Nous les maris candaulistes
Hommage que je rends à vous, messieurs les maris prêteurs ; un remerciement de la part d'un complice de jeux coquins. nous les maris candaulistes, je nous qualifierais comme des hommes à part, pleins de contradictions, remués de part en part d'ennuyeuses bonaces en tempêtes extatiques. c'est la rançon pour une vie, tout, sauf classique. notre mode d'aimer vient de l'ère assourdie où le roi candaule régnait sur la lydie. c'est ce monarque atypique qui initia, Éperdu de désir pour sa femme nyssia, la pratique par laquelle un mari partage, avec d'autres, sa chérie, sans ire ni rage. déjà vous vous agitez et criez au fou, croyant notre tête victime du grisou. bonnes gens, soyez rassurés, il n'en est rien. si nous agissons ainsi, c'est pour notre bien. exprès j'use du pluriel, car c'est notre dont cet exercice renforce la fusion. un adjectif nous est inconnu : narcissique, tant il est loin de notre vision érotique. « vous n'êtes donc point jaloux » dites-vous, moqueurs, « que votre aimée goûte à d'autres mâles vigueurs ? » nous transmutons la douleur que crée cette envie et chaque fois davantage aimons notre mie. nos coeurs battent plus fort et brillent dans la nuit de ces amours plurielles. À l'aube, reconduit par de singuliers « je t'aime » toujours plus forts, notre couple vit mieux, vous qui le pensiez mort. pareils à candaule amoureux fou de sa reine, c'est l'oeil fier que nous la contemplons perdre haleine dans les bras vigoureux d'un amant apaisant. oui, il arrive que le flux et le jusant de nos sentiments fasse battre la chamade en voyant nos femmes en pleine cavalcade sur ces pieux vigoureux et gorgés de désir essoufflées, à force de crier leur plaisir. faut-il une âme bien née pour le supporter ? plutôt un couple uni pour se réconforter. je sais bien que je ne vous ai pas convaincus. pour vous, nous ne sommes que de simples cocus, aux cornes si larges, qu'avec pareils trophées, des maris trop bons, nous sommes les coryphées. nous adorons ces bois, gagnés à la sueur d'un dialogue amoureux qui a vaincu la peur. et c'est toujours avec leurs maris que nos femmes, de l'amour le plus puissant, rallument la flamme.








